mardi 15 août 2017

Henri Beugras - Le brouillard

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Henri Beugras 

Le brouillard 

Ed. L'Arbre Vengeur 


Si un épais brouillard peut considérablement réduire la portée visuelle, il peut également avoir raison de la santé mentale des gens qu'il isole. Ainsi, perdu dans la purée de pois, prisonnier d'un mauvais rêve kafkaïen en forme de vi(ll)e étouffante et cloisonnée, notre personnage fait face à une absence totale de perspective. Il pèse sur la cité un sentiment d'opacité, d'inertie, d'oppression et l'absurdité y est poussée à son extrême. Pour Isidore Duval, le besoin de liberté est plus fort que tout et le salut ne peut venir que de la fuite. Mais que fuir quand on ignore où on est ? Et pour aller où quand on ne se souvient plus d'où l'on vient ?

Ce roman, malheureusement le seul d'un auteur honteusement rare, est une farce paranoïaque sur la folie et l'enfermement. La ville est un tout, les citoyens, résignés, sont atteints d'amnésie collective. On ne peut se fier à rien ni faire confiance à qui que ce soit. Tout comme le décor se dissimule derrière le brouillard omniprésent, chacun est masqué. L'invisible est de mise, le minimalisme également, le port du masque obligatoire. Il se vit ici une comédie grotesque, un carnaval de fous lâchés dans un semblant très relatif d'autonomie.

Avec ses effets de mise en scène et ses aperçus d'une chute inéluctable, ce roman à l'ambiance pesante est perturbant, riche, stimulant. Il offre une vision pessimiste de la vie et des relations humaines, dépeint un monde de clowns tristes, une existence dénuée de sens et de finalité, sur un ton de badinerie maussade. Et non dépourvu d'élégance.

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